Ilan Ilan est un trio qui se consacre à la chanson, genre omniprésent en Haïti, que ce soit à
travers les chants traditionnels qui s’échappent des mornes, les refrains engagés des luttes sans cesse renouvelées, les oeuvres des poètes que la musique porte vers ceux qui n’ont pas accès à l’écrit, ou encore la variété française que diffusent les radios à longueur de journée.
Le groupe « Ilan-Ilan » est issu, en partie, de la communauté haïtienne expatriée, représentée par son compositeur-interprète et son auteur, qui se sont établis respectivement en France et aux Etats-Unis..
Reynold Henrys, « Renol », est musicien haïtien, membre fondateur, compositeur et chanteur du trio « Ilar-Ilan». A la fin des années 70, il a dirigé le groupe
<< Kiskeya », quintet haitiano-dominicain qui répercutait, en Belgique et en France, la vague des chants patriotiques, où les propos anti-Duvalier s’accordaient aux rythmes traditionnels du tambour haïtien. Enseignant de créole haïtien, il a également collaboré, en tant que traducteur, à la production des ceuvres de la conteuse Mimi Barthélémy ou encore du guitariste-chanteur Beethova Obas.
Michel-Rolph Trouillot, Haïtien, est anthropologue et enseignant à l’Université de Chicago. Il est l’auteur de la plupart des textes des chansons de «Ilan-Ilan », qu’il écrit à partir des musiques de Reynold, ou bien qui inspire celles-ci. Il a également composé des chansons (paroles et musique) interprétées par d’autres artistes haïtiens, parmi lesquels Manno Charlemagne et Toto Bissainthe.
Serge Tamas, guitariste originaire de Guadeloupe, évolue dans les registres de la guitare classique, du jazz et de la musique antillaise. Sa pratique des musiques haïtiennes a commencé avec la rencontre de Pierre Chériza Fénélus’. Par la suite, il a dirigé le projet du club UNESCO « Voix et tambours d’Haïti >> à Port-au-Prince. Régulièrement, il compose des musiques pour Mimi Barthélémy, qu’il accompagne sur scène.
François Domergue est formé aux percussions caraïbes (haïtiennes et cubaines), brésiliennes et indiennes. C’est auprès du tambourineur Azor qu’il s’est spécialisé dans les rythmes haïtiens.
1 Tambourineur haïtien qui a vécu de nombreuses années à Paris et qui a accompagné, pendant plusieurs dizaines d’années, le ballet « Tam Tam et Percussion >> du chorégraphe Félix Blaska; cf. « Haïti : musique du vaudou », Musique du Monde, Buda Musique, 92731-2
Ensemble, Serge, François et Renol constituent le trio « Ilan-Ilan », dont le nom désigne la fleur ilang-ilang au parfum caractéristique, que l’on peut rencontrer dans la région de Port-au Prince. Ce nom dégage aussi toute la sensualité du souvenir : le parfum épicé des fleurs des bas-côtés, l’éclat de leur couleur sur fond de bleu céleste, le timbre joyeux et rythmé du créole.
De même que les sens font revivre le souvenir, le propos musical du groupe consiste à faire revivre les rythmes de la tradition dans une nouvelle expression pleine de fraicheur créative e poétique. En marge des clichés exotiques ou folkloriques, il propose une re-formulation originale de cette musique populaire qui se déploie en rythmes innombrables : nago, pétro, ibo, mahi,
raboday, contredanse, etc.
De leur côté, les textes obéissent à un mouvement similaire, dont les sonorités et le rythme même du nom, «Ilan Ilan », sont programmatiques. En effet, les paroles de Michel-Rolph
Trouillot font appel au génie sonore et à l’esprit malicieux de la langue populaire, Dans leur poésie, ils lui confèrent ses lettres de noblesse, tout en en conservant la saveur naturelle.
Ni reproduction folkloriste, ni création oublieuse du pays, de son peuple, de ses joies et de ses souffrances, « Ilan Ilan» diffuse jusqu’à nous le parfum d’un souvenir qui se vit au présent.