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Festival Haizebegi

L'Édito

12ᵉ édition

Notre condition humaine

Depuis douze ans, Haizebegi nous donne rendez-vous à l’automne pour un festival qui conjugue art, science et société. Des concerts, des ateliers, des stages, des films, des spectacles, des rencontres, des conférences, des colloques nous font considérer la musique, à la fois comme un outil d’analyse des sociétés humaines et comme un outil du changement social.

2023. L’Orchestre féminin Zohra d’Afghanistan donne ici le premier concert de son exil européen. Le régime taliban de 2021, terrorisé par la seule présence de ces jeunes femmes musiciennes à Kaboul, les avait condamnées à fuir. Le Portugal leur donna asile, Haizebegi les invita, liant dans un même regard création musicienne, théocratie et diplomatie.


2024. David Krakauer et Kinan Azmeh, l’un spécialiste du klezmer juif, l’autre du maqam syrien sont nos invités. C’est une réponse certes symbolique, mais forte, à la violence qui embrase le Moyen-Orient. Nous avons couplé ce concert avec le colloque organisé avec la Fondation Croix Rouge et le CICR : La musique et le droit international humanitaire en temps de guerre.


2025. Nous poursuivons cette année avec la Fondation Banglanatak de Calcutta, un opérateur important du changement social en Inde et auprès de l’UNESCO. Son programme Art for Life a été élu par l’ONU « meilleure pratique dans le développement des industries créatives et du tourisme responsable ». En Inde, Banglanatak travaille avec 55 000 artistes. Elle mobilise les « capabilités » de chacun pour qu’elles deviennent des outils de développement des communautés les plus pauvres. Parmi ces personnes : 8 000 musiciens. Et parmi ces musiciens : la troupe des Bauls du Bengale que nous avons la chance d’accueillir, pour la première fois en Europe, à Bayonne les 16 et 19 octobre, et au Théâtre du Quintaou d’Anglet le 18 octobre.


Les Bauls du Bengale

Les Bauls sont des musiciens de grand chemin qui font de leur itinérance une métaphore du voyage spirituel. Leur spiritualité millénaire se nourrit de détachement et d’un rejet de toute autorité religieuse. Pour les Bauls, l’essence divine réside en chaque être humain. Grâce aux outils mis en place par Banglanatak, les musiciens Bauls sont aujourd’hui les figures charismatiques des grands festivals internationaux de musique.

Ce partenariat d’exception nous permet d’organiser, le 18 octobre également, des rencontres sur La culture comme outil de développement et de justice sociale sous le parrainage de l’UNESCO, de l’Ambassade de l’Inde et du CNRS. Cette journée sera préparée par les élèves de Terminale du Lycée René Cassin dans le cadre des Ateliers du Futur qui leur donnent la parole. Une restitution sera proposée le 16 octobre.


Le festival s’achève le dimanche 19 octobre par une grande fête de l’Inde. Vous pourrez rencontrer les musiciens, connaître leur démarche, écouter leur musique, voir les films, et partager avec nous tous un repas indien préparé par les jeunes Mineurs Non Accompagnés de l’Institut Don Bosco, encadrés par les chefs cuisiniers des restaurants indiens de notre agglomération. Un beau moment de rencontre pour construire, ensemble, un avenir désirable.

Haizebegigazte
Cette rencontre avec les Bauls du Bengale ne doit cependant pas masquer l’initiative Haizebegigazte, un incubateur des jeunes talents, que nous reconduisons cette année. Dans ce cadre les jeunes musiciennes du groupe basque Habia présenteront leur nouvelle création Omen lors du concert d’ouverture du festival. Cette initiative nous permet en outre de programmer de jeunes professionnels du Conservatoire Supérieur du Pays Basque Musikene, à Saint-Sébastien. Les jeunes accordéonistes Bela Brichzin (Allemagne) et Petra Juriša (Croatie) vont interpréter des œuvres d’Arvo Pärt que le public réclame si souvent.

MusiKautisme
Cette année est marquée par la reprise du programme MusiKautisme. Un partenariat inauguré avec le cinéma Itsas Mendi d’Urrugne vient en écho de celui que nous prolongeons avec L’Atalante, puis une journée de débats qui permettront de réunir, le 11 octobre à la Cité des Arts de Bayonne, des scientifiques, des opérateurs culturels, des personnels du monde médical pour explorer les liens entre musique et autisme. Il sera question de ce que peut la musique, mais il sera question aussi des politiques culturelles d’inclusion sociale. Ce vaste programme est lancé avec une forte implication de la CAPB.


Retour à Gaza

On aimerait que la musique et les arts agissent sur le monde, révèlent ce que l’humanité a de meilleur, aident à construire des vies bonnes, rappellent à la guerre qu’elle ne peut arracher la morale à la politique. Pourtant, une boucle apocalyptique achève cet éditorial. Comme un écho à la rencontre entre David Krakauer et Kinan Azmeh l’an dernier, nous accueillons cette année, avec la Scène Nationale du Sud-Aquitain, la chorégraphe palestinienne Samar Haddad King et son Yaa Samar! Dance Theater. Le spectacle protéiforme, Gathering, nous transporte dans ce village palestinien où les orangers meurent de leurs blessures alors qu’une femme fait d’une douleur inhumaine une partition de résilience. L’occasion pour nous d’interroger, avec l’anthropologue Marion Slitine (CNRS – EHESS), ce que signifie être une artiste palestinienne aujourd’hui.


Voilà quelques-unes des rencontres qui dessinent ce chemin que nous balisons ensemble depuis 12 ans, de Bayonne à Labastide-Villefranche, et de Tardets à Urrugne et à Anglet. Comme une lueur tenace qui façonne cet espoir qui nous fait vivre, fondement irréductible de notre condition humaine.

Denis Laborde,
Directeur du festival.