”En notre fin de siècle qui conjugue ère du vide et société du spectacle, Liszt est plus que jamais actuel, urgent,” écrit Bruno Moysan. La soirée consacrée au compositeur et pianiste Franz Liszt éclaire ce personnage historique, sa virtuosité, son goût pour la mise en scène, son génie de la composition.
Une soirée Lisztéenne

Grande figure du romantisme, virtuose du piano, et compositeur de génie, le nom de Liszt a traversé le temps. Ce vendredi 20 octobre 2023, le festival Haizebegi invite à découvrir son univers grandiose. Bruno Moysan, musicologue et grand spécialiste de Liszt présente ses recherches sur les Fantaisies et la Sonate en Si mineur du compositeur. En fin de soirée, Pierre-Alain Volondat offre une interprétation enivrante de cette sonate, en faisant résonner toute la beauté du piano romantique.
Prodige du piano, Liszt le révolutionne

La virtuosité de Liszt a traversé les âges. Son nom résonne toujours aussi fort aujourd’hui, autant pour sa qualité de compositeur que de pianiste. Interpréter Liszt n’est pas aisé. Au cours de la période romantique, le piano est l’instrument phare, son répertoire et sa technique s’enrichissent. Liszt y contribue de manière décisive, posant de nouvelles bases à la technique pianistique. Chez lui, le pianiste est contraint à une gymnastique mentale et physique éprouvante.
La virtuosité de Liszt est aussi dans sa composition, qu’il enrichit de multiples nouveautés musicales. Les analyses du musicologue Bruno Moysan sur les Fantaisies et la Sonate en si mineur de Liszt révèlent l’ingéniosité du compositeur. Notamment dans la manière dont il a repris des procédés inventés par ses pères, surtout Rossini et Beethoven dans le cas de la sonate. Dans ses compositions, Liszt a sans cesse cherché à aller plus loin. C’est également sa rivalité avec Chopin qui l’a poussé à se dépasser.
À l’analyse, Bruno Moysan décèle un goût pour l’amusement dans un grand nombre de partitions de Liszt. C’est sans doute ce qui a poussé le compositeur à explorer aussi loin le clavier, sa technique et son répertoire. Cent trente sept ans après la disparition du compositeur, sa virtuosité fait toujours l’objet d’admiration et sert d’école à nos contemporains.
Une figure actuelle

Liszt connaissait l’art de la mise en scène, il savait se façonner un personnage public. « Il avait compris les techniques de marketing avant l’heure, en lien avec la montée du capitalisme. Il était déjà postmoderne à son époque, » explique Bruno Moysan. Un autre trait de sa modernité était son goût pour la réécriture et l’hybridation. Près de la moitié de son répertoire repose sur des pièces d’autres compositeurs. Il partait de l’improvisation et souvent ajoutait une troisième portée à la partition qu’il explorait. Il développait dans ces réécritures un dialogue entre son moi et le compositeur originel. Cela rappelle, selon Bruno Moysan, une figure plus contemporaine du compositeur, celui apparu dans les années 50 et 60, avec les cross over, le sampling, le remix, le rewriting… Par sa modernité, son goût de la mise en scène, Liszt peut être comparé aux acteurs de la société du spectacle.
Marie Le Diraison

